La mort d’Ousama Ben Laden a démontré que les Etats-Unis n’avaient pas renoncé à retrouver l’inspirateur des attentats du 11 septembre. Le message est sans équivoque : qui s’attaque à l’Amérique ne connaîtra aucun répit. Tôt ou tard, l’heure du jugement viendra.
Toutefois, son décès pourrait offrir également un espace aux partisans de la théorie du complot qui soutenaient, depuis des années, que les Etats-Unis ne voulaient pas vraiment trouver et juger Ben Laden, en vertu des « révélations » qu’il aurait pu faire sur la politique américaine dans le monde arabo-musulman et, en particulier, en Afghanistan.
Certes, un procès public aurait peut-être permis de révéler des zones d’ombre sur les alliances impies de la CIA lors de la guerre contre les occupants soviétiques dans les années 1980, mais les faits majeurs de l’appui américain aux Moudjahiddines afghans par le biais de Ben Laden sont déjà largement connus. Le risques d’un « grand déballage » étaient limités.
La mort de Ben Laden empêche, cependant, la tenue d’un procès exemplaire, car il aurait été essentiellement celui du terrorisme international. Il aurait permis, en opposant la force du droit à la violence des bombes, de fixer clairement les lignes de partage.
Rassurés par leur victoire, les Etats-Unis auraient pu saisir cette occasion pour revenir aux valeurs éthiques et aux normes juridiques qu’ils avaient délaissées après le 11 septembre, lorsqu’ils créèrent un système de prisons, d’interrogatoires et de tribunaux, en porte-à-faux avec la Constitution américaine et avec le droit international.
Mené avec sérieux et rigueur, ce procès aurait pu acquérir une importance emblématique, à même de décrédibiliser à la fois les idées d’Ousama Ben Laden et les moyens – le terrorisme- auquel il avait choisi d’avoir recours.
Il aurait forcé tout le monde à choisir son camp, non pas simplement entre l’Amérique et son « ennemi public numéro un », mais bien plus symboliquement encore entre la justice et la barbarie.
PS: pour lire une approche sceptique à l’égard d’un jugement de Ben Laden, lire le texte de Jon Silverman, professeur de justice criminelle à l’Université de Bedfordshire http://www.bbc.co.uk/news/world-south-asia-13279532?print=true
Cet article comporte un lien vers une opinion favorable au procès, écrite par le juriste Geoffrey Robertson.
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Tout à fait d’accord. Quand la démocratie ne respecte pas ses propres principes, elle s’affaiblit.
Si procès il y avait eu, quelle que soit son issue et quoi qu’on y ait dit (et les révélations éventuelles qu’on y aurait faites), on se serait retrouvé avec le camp qui soutient Ben Laden (ou, plus exactement, le camp pour lequel rien de ce qui se passe aux USA ne trouve grâce) qui nous aurait sorti qu’il s’agissait là de la “justice des vainqueurs” faites de débats truqués. Et le choix des camps est déjà fait. Le procès n’y aurait rien changé
Il est clair que les partisans des théories du complot auraient de toute façon déballé leurs inepties quoi qu’il arrive, et qu’un procès n’auraient rien changé en ce sens.
Il ne faut pas oublier également que garder ce monstre prisonnier aurait très certainement mené à des chantages en tout genre de la part de terroristes, qui auraient à tous les coups tentés par tous les moyens de le faire libérer.
Maintenant, il est vrai aussi qu’on en a fait un martyr. Chose qu’il aurait été de toute manière, même avec un procès, ne serait-ce que parce qu’il a mené son répugnant combat jusqu’au bout.
Le seul détail gênant est que les Etats-Unis auraient pu en le capturant briser l’état de non-droit qui est la règle depuis le 11 septembre dans cette affaire.
Mais même avec la meilleure volonté du monde, il est douteux qu’un tel individu se laisse appréhender.
Quoi qu’il en soit, justice est faite. Sa mort, il l’a plus que méritée.
Remarquez la subtilité du langage …. Ben Laden est juste “inspirateur”. Le journaliste ne prend visiblement aucune risque quant à savoir si OBL est coupable ou non dans les attentats du 9/11/2001 !
subtilité ou plutôt rapidité? Et comment qualifier le mot “barbarie” que j’applique au terrorisme de Ben Laden? Subtilité ou rapidité? Votre question est évidemment légitime mais elle trouve sa réponse dans le reste de l’article. Bonne journée.
Depuis quand les journalistes ont à se prononcer quant à la culpabilité de quiconque ? D’ailleurs comment le faire dans ces affaires du 11 septembre et de la mort de Ben Laden sachant que dans les deux cas, les autorités US n’ont pas vraiment joué franc-jeu, et c’est un euphémisme ? Or justement, ne pas communiquer avec la presse, ça revient presque à la museler, comme dans ces contrées tant décriées… depuis que la presse s’en est mêlé.
Un procès était dû à toutes les victimes, pas seulement aux victimes directes du terrorisme, mais aussi à tous ces Musulmans de Tunisie, d’Égypte, de Syrie et d’ailleurs qui voudraient faire savoir que leur Islam ce n’est pas celui de Ben l’ADN, à toutes les victimes passives, celles qui restent avec la terreur du non-droit, du manque de liberté (de la presse).
Avec cette exécution sommaire, il paraît que Justice est faite…
Mais la Vérité et le Droit (à l’information) n’ont-ils rien à voir avec la Justice ?
Avec cette exécution, l’Amérique a cédé à son culte de la violence et des armes, peut-être bien par calcul électoraliste. Et ceux qui se félicitent du fait sont complices, autant du déni de démocratie que des violences qui risquent de s’ensuivre.
Les peuples en souffrance, les vrais démocrates attendaient autre chose. Nous attendons tous la paix.
Partout je vois: si on ne l’avait pas tué, il serait devenu un Martyr. C’est faux, c’est plutôt le contraire. Un Martyr par définition est un homme mort, pas un homme qui pourrit dans une prison…
Un procès aurait juste servi de formidable forum d’expression aux partisans du terrorisme international. Celui-ci n’a d’existence que par la publicité qui est faire autour de ses actions (voir les attentas du 11/09). Les empêcher de s’exprimer (par la parole ou par l’image), c’est les empêcher d’exister.
Le respect des principes démocratiques est une vérité qui doit s’appliquer avec un minimu de bon sens. En 1936, les démocraties ont usé de moyens démocratiques envers Hiltler. On a vu ce que ça a donné …
Je m’étonnais de ne pas entendre parler de “justice” dans les médias. Merci d’avoir osé vous étonner de la normalité d’un tel traitement en soulignant à quel point les Etats-Unis avaient raté le coche… Un retour en arrière? Ou l’absence de progrès? Bref, encore beaucoup de chemin à faire…. Ou alors, définitivement, le droit n’a plus sa place dans nos sociétés? Obama et les Etats-Unis auraient pu être un exemple et marquer à jamais l’Histoire démocratique. Dommage.