Il y a 50 ans, le procès d’Adolf Eichmann à Jérusalem.

Le 11 avril 1961, s’ouvrait à Jérusalem le procès d’Adolph Eichmann, le principal organisateur de la déportation et de l’extermination des Juifs d’Europe.

La revue L’Histoire a consacré un remarquable numéro à ce procès à tout égards historique, soulignant sa signification essentielle pour l’humanité. Hier et aujourd’hui.

Précédé par l’arrestation spectaculaire d’Eichmann à Buenos Aires par les services secrets israéliens, couvert par de grandes personnalités intellectuelles, comme la philosophe Hannah Arendt, auteure de la célèbre expression « La banalité du mal », le « Nüremberg du peuple juif”, comme le qualifia le premier ministre israélien Ben Gurion, fit entrer la Shoah dans l’histoire.

Il provoqua également en Israël, comme le relève Hanna Yablonka, « une identification émotionnelle générale avec l’histoire de l’Holocauste. La plupart des témoins, des citoyens israéliens arrivés en Israël au cours des dix années qui avaient suivi la guerre, étaient mus par le sentiment d’accomplir une mission. Celle-ci consistait à établir un lien avec ceux qui n’avaient pas vécu cette expérience, à constituer une mémoire, à enraciner la commémoration des Juifs assassinés, à formuler les grandes lignes du récit historique à l’intention des générations à venir ».

Le rappel de cet événement essentiel à l’histoire et à la mémoire du génocide des Juifs d’Europe ne devrait pas cacher, cependant, qu’il fut une exception. Trop de hauts dignitaires hitlériens, trop de “collaborateurs” dans les pays occupés, trop d’ « hommes ordinaires », exécutants des basses œuvres nazies, réussirent à échapper à la justice. La plupart d’entre eux sont morts dans leur lit, bénéficiant d’une intolérable impunité et d’indécentes complicités.

Certains chasseurs de nazis, toutefois, n’ont pas abandonné l’espoir que les derniers survivants de la machine de mort nazie comparaissent devant leurs juges. Ces dernières années, l’Opération Dernière Chance, créée à l’initiative du Centre Simon Wiesenthal d’Israël et la Fondation Targum Shlishi, s’est évertuée à retrouver ces criminels de guerre, installés en particulier en Allemagne, dans les pays baltes, l’Autriche, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie et la Croatie.

Le directeur de l’Opération, Efraim Zuroff, a écrit un livre, Operation Last Chance : One Man’s Quest to Bring Nazi Criminals to Justice (en français, Chasseur de nazis, éditions Michel Lafon), qui décrit cette campagne visant à débusquer les derniers criminels de guerre avant qu’il ne soit trop tard.

Ce n’est pas la vengeance qui anime les initiateurs de l’Opération Dernière Chance, mais la poursuite de la justice. Et la crainte que cette barbarie ne recommence.

Face au réveil de l’extrême droite dans le nombreux pays européens, face à la montée de l’ultranationalisme, de l’antisémitisme et du racisme, face à la « rebanalisation du mal », il importe plus que jamais de rappeler l’abomination que fut le nazisme et de démontrer aux personnes tentées par cet ensauvagement que le crime contre l’humanité ne paie pas.

A Jérusalem, ce fut un système – l’exterminationnisme nazi – qui fut jugé, mais ce fut aussi la responsabilité d’un homme, doté de la possibilité de choisir.

« Le procès d’Eichmann, écrit l’éditorialiste de L’Histoire, fut bien le procès d’un individu. Sa culpabilité ne peut être diluée dans les eaux fangeuses d’un système. La complicité délibérée du crime ne peut avoir l’alibi d’une abstraction qui nous dépasse : nous sommes responsables de nos actes ».

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Une réponse à Il y a 50 ans, le procès d’Adolf Eichmann à Jérusalem.

  1. marcos dit :

    Le lien vers l’opération dernière chance pointe vers “localhost”. Le bon lien ?

    Quant à ceux qui pensent que les derniers nazis sont trop vieux et que tout cela est de l’histoire ancienne, je veux seulement dire que les bourreaux doivent savoir qu’ils ne peuvent pas dormir tranquillement. Au nom des victimes, au nom de la justice, au nom de la mémoire, au nom des futures victimes d’autres bourreaux, nous devons avoir le courage de dire « tu seras jugé ». Même dans un fauteuil roulant, un bourreau est encore en meilleure santé que sa victime morte !

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